perli (gianese)_de nos jours


2014

le vendredi 19 septembre 2014 à 18 h00

par Lucien PERLI

 

Et si c’était à refaire

je referais ce chemin

La voix qui monte des fers

parle des lendemains…

ARAGON

Cimetière Saint-Roch-Grenoble

 

Création de GEO PERLI

Marquant ce moment de mémoire

 

Le vendredi 19 septembre 2014 à 18 heures, Cimetière Saint Roch Grenoble

 

14 août 1940 - Quartier Route de Lyon - Esplanade

 

J’ai trois ans - Maman (mémé Marie) est enceinte de GEO - la nuit tombe, imaginons…

 

La France du Maréchal PETAIN vient de capituler et se fait conciliante avec l’envahisseur nazi. Grand père DOMINIQUE (il nonno MENO) réagit à l’événement en réunissant ses trois fils dans la demeure familiale.

 

Sont là :

 

- GUERINO, le fils ainé, mon papa 25 ans, employé aux établissements GONY à Grenoble, marié à Gaetana GIANESE, ma maman

 

- LEOPOLD, mon oncle 21 ans, employé à la chocolaterie MILAND à Grenoble

 

- CESAR, mon autre oncle, apprenti soudeur

 

Sur la table de la cuisine, le bol du Grand-père Dominique : jamais de verre, toujours un bol pour le grand-père. Il porte le bol à ses lèvres, avale une gorgée, essuie machinalement d’un revers de manche son imposante moustache grise :

 

"TOSI ! Bisogne fare qualche cose" (Mes enfants ! il faut faire quelque chose)

 

Lui combattant et rescapé, et à l’époque marié et père de famille, lors du meurtrier conflit italo-autrichien de 1914-1918 lui qui a connu les affres et les horreurs de la guerre, aux portes de son village natal, VALSTAGNA, dans les alentours de BASSANO DEL GRAPPA au Nord Est de la Vénétie (Haut lieu de la guerre 14-18, le Verdun Italien) 

 

Lui, chassé de son pays d’origine par la misère et les prémices du fascisme mussolinien pour se retrouver en 1924 avec épouse et enfants en bas âge à Grenoble dans ce quartier de la Route de Lyon où il trouvera travail et logement aux "Ciments de la Porte de France".

 

Lui, refuse la capitulation.

 

"AMI ENTENDS-TU LES CRIS SOURDS DU PAYS QU’ON ENCHAINE

OHE ! PARTISANS OUVRIERS ET PAYSANS C’EST L’ALARME…"

 

Pour le Grand père Dominique oui c’est "l’alarme" !

 

 

Conséquence de ce "conseil de famille", Guerino, le fils ainé, aux convictions politiques déjà bien affirmées, refuse l’immobilisme face à l’envahisseur et prend rapidement ses premières responsabilités par des contacts clandestins, en s’impliquant dans l’organisation et la diffusion de la presse clandestine dans le département de l’Isère en 1941-1942. Par ses diverses activités de "résistance" il côtoiera nombre de figures de résistants tragiquement disparus, comme POLOTTI  ou LENOIR. Dans les années 1943-1944 il tiendra un rôle prépondérant de "grand-frère" en persuadant bon nombre de jeunes du quartier Route de  Lyon, Esplanade à rentrer en résistance en particulier les jeunes réfractaires au STO (Service du Travail Obligatoire).

 

Tout naturellement dans les années 1943-1944, LEOPOLD et CESAR, les deux plus jeunes frangins, s’impliquent aussi dans la lutte contre l’occupant et rejoindront les maquis de Chartreuse (3ième Bataillon FTPF).

 

Petit historique : les effectifs des maquis de Chartreuse étaient issus des quartiers Nord de Grenoble (Esplanade, Route de Lyon, Porte de France) et aussi de Buisserate, St Martin le Vinoux, Saint Egreve, Voreppe et avaient pour consigne de continuer à travailler dans leurs diverses entreprises tout en participant à des actions de sabotage qui pouvaient désorganiser le potentiel de guerre de l’ennemi.

 

"OHE ! PARTISANS A VOS ARMES ET VOS COUTEAUX TIREZ VITE

OHE ! SABOTEUR ATTENTION A TON FARDEAU DYNAMITE"

 

11 JUIN 1944 - Un dimanche pas comme les autres, j’avais 7 ans, LEOPOLD, tonton PAUL pour les intimes, pour moi tonton "chocolat", employé à la chocolaterie MILAND à Grenoble d’où il ramenait dans les sacoches de son vélo, des brisures de chocolat pour le petit gourmand que j’étais. Quel privilège dans cette période de restriction !

 

Tonton PAUL, ce dimanche, après deux jours de "maquis" en Chartreuse, lieu dit : Prairie de Girieux (entre Proveyzieux et le Col des Charmettes) lieu de campement du maquis, revenant à pied au domicile familial 7 ancienne Route de Lyon, en compagnie d’un déserteur Italien venu renforcer l’effectif de la section.

 

Parvenus à la hauteur du Col de Clémencières, au pied du Néron, ils se sont fait surprendre par le tir d’une mitrailleuse allemande postée en haut du Col. Ils n’en réchapperont pas…

 

CITATION - à l’ordre de l’Armée signée du Général de Gaulle

 

" Très bon soldat, discipliné et courageux. Blessé et fait prisonnier par l’ennemi alors qu’il effectuait une mission de liaison. Eut la volonté quoique étant sérieusement touché de faire disparaître les plis qui étaient en sa possession. Interrogé par l’ennemi, observa un silence profond. Fut achevé par l’ennemi rendu furieux par son mutisme."

 

"ICI CHACUN SAIT CE QU’IL VEUT, CE QU’IL FAIT QUAND IL PASSE.

AMI, SI TU TOMBES UN AMI SORT DE L’OMBRE A TA PLACE"

 

Aujourd’hui dans notre démarche de cheminement dans les sentiers de la mémoire comment ne pas associer au comportement héroïque des 3 frères (tous les 3 médaillés de la Résistance)  le rôle et l’implication des femmes de la famille ? Combien d’absence des fils, du mari, endurées et supportées par la Grand-mère TERESINA et la discrète MARIE, ma maman. Que de risques encourus par des passages de clandestins et réunions secrètes organisées dans la demeure familiale.

 

Parmi nous aujourd’hui, un grand témoin de cette tragique mais aussi exaltante époque : Tatan Ginette, veuve de Tonton CESAR qui malgré ses presque 89 ans est là avec nous. Elle qui a perpétré toute sa vie par ses engagements politiques, les valeurs de la résistance.

 

Associons aussi à notre démarche familiale tous ces "jeunes" de la route de Lyon, quartier qui nous est cher, qui bâtirent avec quelques risques et dangers "des lendemains qui chantent pendant que des gens aux creux des lits faisaient encore des rêves".

 

Je les cite :

Jean BUISSON-DEBON, Achille BALDINO, Louis BEAUME, Roger BUIS, Michel BERTHET-PILLON, Pierre CAVALLI, René CHOROT DALLAGNOLLE, Marcel DUPELEY, Bernard DURAND, Georges ECHEVET, Paul FANTON, Louis FAYEN, Georges FIORINA, René FIORINA, Aldo GALLI, Henri GERBAUD, Michel GERBAUD, Antoine GIANECCHINI, André JARRAND, Charles JARRAND, Marcel LAURANT, Richard LORIGIOLA, Alfred MERLE, Elysée MERLE, André MICHON, Olivier NEGRELLO, Jean OZINO, Daniel OZINO, Guerino PERLI, Léopold PERLI, César PERLI, René RETAROLY, Charles REYMANN, Louis ROISON, Lucien ROCHAS, Samuel REISS, Franck ROTA, Paul RUELLE, Raymond RUELLE, Louis SPONGA, Aldo TREVISSON, Florimond TREVISSON, André VALLON, Jacques BRACHET, Honoré LIEUTHIER.

 

Permettez-moi d’ajouter à cette illustre liste, Jo Beppino FESSLER et Simone JOUANDET "Liliane dans la résistance" que le poids des ans empêche d’être avec nous aujourd’hui.

 

"DEMAIN DU SANG NOIR SECHERA AU GRAND SOLEIL SUR LES ROUTES,

CHANTEZ COMPAGNONS DANS LA NUIT LA LIBERTE VOUS ECOUTE…"

 

Pêle-mêle, jetée sur le papier, une musique de prénoms, toute notre descendance, prénoms qui, par le hasard des rencontres, incarnent dorénavant le comment et le pourquoi de notre belle et généreuse famille.

 

Les "vieux" : GEO, MICHELE, CONCETTINA, POPAUL, MICHELE, RICHARD, MONIQUE, CATHY, BUBU, JEANINE, LUCIEN…

 

et les nouvelles générations : GILLES, EVELYNE, MARJORIE, ANAËLLE, PASCALE, LUCIE LOU, VALERIANNE, DAVID, TARA, LAZLO, MARINE, DAMIEN, CHRISTOPHE, PRATICIA, MARINE, OSCAR, ZOE, PRISCA, FREDO, DAVID, PATRICIA, LOLA, WILLIAM, MARYLINE, ILONA, ELIO, GAETAN, SARAH, JULIE, FLO, GREGORY, EMMANUELLE, NOEMIE, MELANIE, MARJORIE, FLORENCE, STEPHANIE, LUDOVIC, ANNE, BAPTISTE, RAPHAEL, FREDERIC, KAREN, ANTONIN, ANDREA, LEIA, MAYA…, INAÏS, YAEL, ROMY…

 

A vous de transmettre, de vous rencontrer, de perpétrer les valeurs de partage, de tolérance, de générosité, d’hospitalité… léguées par nos anciens. Imaginons une course de relais où nous continuons de nous passer le bâton témoin de la mémoire sans jamais le laisser tomber.

 

Une pensée pour Yvon qui repose là bas au pied du Mont Aiguille. Pour LUC, notre chauffeur pour ce mémorable voyage initiatique en Novembre 1999 en Italie sur la terre des PERLI vers BASSANO DEL GRAPPA…

 

Grazie mille aux cousins : MARISA, MARCELLO, GIOVANNI venus spécialement d’Italie pour partager ce moment de recueillement.

 

"Résister c’est aussi ne pas oublier"

Un moment de silence, puis nous nous mettons à chanter  "la Bella ciao"

 

Stamattina mi sono alzatto

O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao

Stamattina mi sono alzatto

E ho trovatto l’invasor

O partigiano portami via

O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao

O partigiano portami via

Ché mi sento di morir

E se io muoio da partigiano

O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao

E se io muoio da partigiano

Tu me devi seppellir

E seppellire lassu in montagna

O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao

E seppellire lassu in montagna

Sotto l’ombra di un bel fior

E la gente che passeranno

O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao

E la gente che passeranno

Mi diranno : che bel fior

 

E quest’è il fiore di partigiano

O bella ciao, bella ciao, bella ciao ciao ciao

Quest’è il fiore di partigiano

Morto per la libertà.

 

Un grand merci pour votre touchante et émouvante présence :

 

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2022 03